Angela Merkel s’est lancée dimanche dans une ultime tentative pour former un gouvernement et éviter à l’Allemagne et à l’Europe une phase d’instabilité, synonyme aussi pour elle de possible fin de carrière politique.
Les négociations menées entre son camp conservateur (CDU-CSU), les Libéraux du FDP et les écologistes ont démarré vers 11H30 (10H30 GMT) et doivent se terminer dans la soirée avec obligation de résultat: accord ou échec.
“La journée d’aujourd’hui est la dernière pour les négociations, nous devons trancher”, a dit à son arrivée le président du parti bavarois CSU, Horst Seehofer. “Jusqu’ici on jouait les prolongations, maintenant on en est aux tirs aux buts”, lui a fait écho un des dirigeants des Verts, Cem Özdemir.
Au pouvoir depuis 12 ans, la chancelière démocrate-chrétienne a certes remporté fin septembre les élections législatives allemandes.
Mais elle l’a fait avec le pire score depuis 1949 pour son parti du fait de la percée de l’extrême droite de l’Alternative pour l’Allemagne (AfD), qui surfe sur le mécontentement d’une partie de l’opinion suite l’arrivée de plus d’un million de demandeurs d’asile.
Conséquence: Angela Merkel a toute les peines à trouver une majorité à la chambre des députés, où les sociaux-démocrates ont réitéré dimanche leur refus de gouverner avec elle après avoir été laminés aux élections. Ils se préparent à une cure d’opposition.
- Date-butoir -
La chancelière mène du coup depuis plus d’un mois des négociations très difficiles en vue de former sa coalition, sur le papier contre nature, avec les Libéraux du FDP et les Verts. Un attelage hétéroclite encore jamais expérimenté au niveau national en Allemagne.
Dimanche, ce qui se profile comme la réunion de la dernière chance doit s’achever en principe vers 18H00 (17H00 GMT), mais avec possibilité de prolongation dans la nuit. Une première date-butoir est déjà passée jeudi soir sans résultat.
Faute de compromis, l’Allemagne devra sans doute retourner aux urnes début 2018. Des élections qui se feraient très probablement sans Angela Merkel à la tête du parti démocrate-chrétien (CDU) tant son sort est lié au succès des tractations en cours.
“Elle a tout intérêt à ce que ce gouvernement voie le jour, car un échec signerait aussi sa fin” politique, juge Frank Decker, politologue de l’université de Bonn, sur la chaîne de télévision parlementaire allemande, Phoenix.
Angela Merkel est déjà fragilisée au sein de sa famille politique depuis sa mauvaise performance aux législatives.
Son cap centriste et sa décision d’ouvrir les frontières du pays en 2015 aux migrants restent très controversés au sein de la CDU, et surtout de la CSU, qui réclame un virage à droite.
“Ce week-end, c’est la coalition ET la chancelière qui sont en jeu”, estime le quotidien Bild, “si elle échoue, elle pourrait entrer très vite en zone de turbulences”.
Selon un sondage publié dimanche par le journal Die Welt, 61,4% des Allemands ne pensent pas qu’elle pourra se maintenir en poste en cas d’échec.
- Controverse sur les migrants -
Principale pierre d’achoppement
des négociations: la politique migratoire en Allemagne.
Les écologistes demandent que toutes les étrangers bénéficiant du statut de réfugiés jouissent de la possibilité de regroupements familiaux. Actuellement, seules certains d’entre eux en jouissent. La CSU et le FDP refusent cet assouplissement.
“La question est de savoir si on veut favoriser encore l’expansion de l’extrême droite dans le pays”, s’est énervé un de ses dirigeants, Alexander Dobrindt.
Les Verts jugent la distinction faite “inhumaine” car ce sont en particulier les réfugiés syriens fuyant la guerre civile qui ne peuvent en profiter.
En cas d’échec, une période d’incertitude politique majeure s’ouvrira en Allemagne et en Europe.
“L’Europe est tout sauf sortie de la crise et la question qui se pose est: va-t-on laisser le président (français) Emmanuel Macron se charger seul d’éteindre les incendies parce que l’Allemagne sera paralysée?”, a demandé dimanche Cem Özdemir.