Malgré sa défaite annoncée, Donald Trump pourrait capitaliser sur le mouvement populiste qu’il a suscité pour lancer un empire médiatique d’extrême droite aux visées internationales, étendant son influence jusqu’en France.
Donné perdant par les sondages, les médias et même les caciques du Parti républicain, que fera Donald Trump une fois battu ? La presse américaine émet l’hypothèse que le milliardaire – sous réserve qu’il ne plonge le pays dans le chaos en renonçant à concéder sa défaite – va construire un empire médiatique d’extrême droite, aux Etats-Unis et au-delà.
Une rumeur qui n’est pas dénuée de fondements : après tout, Trump doit une grande partie de sa célébrité à ses années passées à l’antenne dans l’émission de téléréalité The Apprentice.
Néanmoins, le signe le plus concret de cette reconversion reste sa décision de confier les rênes de sa campagne à Stephen Bannon, ancien de Goldman Sachs et directeur de Breitbart. Cet influent site d’extrême droite, au style trash et décomplexé, est devenu la vitrine du mouvement «alt-right», la frange suprémaciste et complotiste de la droite américaine.
Après avoir penché pour le candidat du Tea Party Ted Cruz début 2015, Breitbart a pris franchement position pour Donald Trump par la suite. Jeudi, la transmission du troisième débat à peine terminée, Breitbart était évidemment l’un des seuls médias à proclamer Trump victorieux à l’issue de la soirée.
Cette ambition internationale n’est pas surprenante. Le site conservateur lancé par Andrew Breitbart en 2005 est devenu, après le décès de son fondateur en 2015 et sa reprise en main par Bannon, un aimant à populistes de tous les continents. Il promeut notamment un ethno-nationalisme blanc et «européanisé» dans tout l’Occident, inspiré par la Nouvelle Droite française.
Breitbart a notamment beaucoup fait pour la notoriété du Front national et de Ukip, parti d’extrême droite britannique, aux Etats-Unis.
En retour, Stephen Bannon a ouvert un bureau de Breitbart à Londres en 2013 et fréquente l’ancien leader de Ukip Nigel Farage depuis. Il s’est par ailleurs inspiré des thèmes populistes, islamophobes et anti-immigration utilisés par le parti europhobe lors de la campagne pro-Brexit pour tracer les contours de la rhétorique trumpienne.
Selon le Financial Times, Jared Kushner, le gendre de Donald Trump et propriétaire de l’hebdo The New York Observer, aurait multiplié, ces derniers mois, les contacts avec «les plus importants intermédiaires de l’industrie» en vue de lancer un média «trumpiste» après l’élection.
Malgré les dénégations officielles de Stephen Bannon et Donald Trump, le spectre d’une «Trump TV», au sein d’un consortium dont Breitbart pourrait faire partie, est une possibilité bien réelle, selon de nombreux observateurs du secteur, qui soulignent l’animosité du candidat du Parti républicain pour Fox News, principale chaîne de télé conservatrice du pays.
Aujourd’hui, sur Breitbart, on peut distinguer quatre onglets géographiques : Londres, Jérusalem, le Texas et la Californie. Bientôt Paris ?