Baupin: le parquet de Paris ouvre une enquête préliminaire après des accusations d’agressions sexuelles et harcèlement
Le parquet de Paris a ouvert mardi une enquête préliminaire sur les accusations d’agressions sexuelles visant Denis Baupin, la majorité s’en remettant à la justice alors que des politiques de tous bords demandent la “fin de l’impunité” pour ce type d’agissements.
L’avocat du député écologiste a annoncé de son côté que M. Baupin, 53 ans, déposait plainte pour “diffamation” contre Mediapart et France Inter qui ont dévoilé lundi les témoignages à charge de huit femmes à l’issue d’une enquête au long cours.
“On parle de faits qui sont d’une extrême gravité. Et si ces faits sont avérés, il faut que ça soit réglé devant la justice. Et si ces faits ne sont pas avérés, il faut aussi que ce soit réglé devant la justice”, a déclaré mardi sur France Info Emmanuelle Cosse, épouse de M. Baupin et par ailleurs ministre du Logement.
Les “allégations” parues dans la presse portent “sur des faits susceptibles d’être qualifiés d’agressions sexuelles, harcèlements sexuels, appels téléphoniques malveillants”, a expliqué mardi le parquet dans un communiqué, rappelant qu’à ce stade, “aucune plainte relative à ces faits n’a été reçue”. “L’enquête va s’attacher à recueillir les témoignages des victimes présumées”, a-t-on encore précisé.
Mme Cosse s’est exprimée mardi matin, respectant une invitation préalable à la révélation des accusations visant son mari. Elle a assuré avoir “appris” lundi ces accusations. “J’ai été très touchée en tant que femme, en tant que compagne, en tant que mère et aussi en tant que ministre”, a-t-elle déclaré.
La ministre de la Santé Marisol Touraine lui a exprimé son soutien “à titre personnel”, estimant sur RTL que “ce qu’elle vit est d’une très grande violence”.
“Il faut être attentif à ce que les choses soient dites clairement devant un juge et que ça ne soit pas simplement de la polémique politique”, a insisté la ministre des Outre-mer George Pau-Langevin sur Sud-Radio/Public Sénat.
– ‘Levons l’omerta’ – Toutes trois ont exprimé leur “intransigeance” ou leur “fermeté” sur la question des violences faites aux femmes.
Dès lundi, alors que les faits décrits sont prescrits, des appels avaient été lancés pour que des victimes sortent du silence.
Au lendemain d’une journée entière où l’éventuelle innocence du député écologiste n’avait été évoquée que par lui-même, le ministre des Finances Michel Sapin a dénoncé des faits “épouvantables”. “C’est à la justice d’établir les faits, pas à la presse ni aux personnes”, a-t-il déclaré à l’unisson du reste du gouvernement.
Lui-même mis en cause pour un geste déplacé envers une journaliste, il a dénoncé une “calomnie”, semblant répondre à la demande de Delphine Batho un peu plus tôt de “faire un grand ménage”.
Même le président du groupe LR Christian Jacob s’est dit sur Europe 1 “prudent”. “On se trouve encore dans cette situation où le procès médiatique a lieu avant celui de la justice. Et ça c’est toujours un point qui me choque”, a-t-il estimé.
Mais déjà les révélations ont dépassé les faits crus rapportés pour devenir le procès de la violence sexuelle et du sexisme en politique.
“Des centaines d’ouvrages décrivent les mécanismes qui conduisent les femmes à +s’adapter+ à la situation plutôt qu’à la dénoncer”, assure le collectif “Levons l’omerta” dans une tribune publiée dans Libération, signée par de nombreux politiques (Roselyne Bachelot, Julien Bayou, Chantal Jouanno, Fanélie Carey-Conte, entre autres).
Pour ce collectif, “le silence des politiques révèle avec force l’impunité, l’absence trop souvent de mesures internes dans les partis et au-delà, la difficulté même de reconnaître que ça existe – même si mezza voce, c’est connu de tous”.
A l’Assemblée, très occupée mardi par la perspective d’un 49-3 pour faire paser la loi travail, le groupe écologiste s’est réuni dans une ambiance “thérapie de groupe”, selon une source proche. Aucune décision n’a été prise sur la nomination d’un nouveau vice-président de l’Assemblée.
Quant au député Sergio Coronado (EELV), d’une sensibilité opposée à celle de M. Baupin, il a estimé que ce dernier “s’honorerait” en renonçant à son mandat de député.