Le Conseil constitutionnel a validé jeudi la garde à vue de quatre jours de Bernard Tapie dans l’affaire de l’arbitrage, tout en décidant que cette durée dérogatoire ne pourrait désormais plus être appliquée dans des affaires d’escroquerie en bande organisée.
Selon le Conseil, ce délit ne portant pas atteinte “à la sécurité, à la dignité ou à la vie des personnes”, il ne peut donner lieu à une garde à vue de 96 heures.
Les juges ont donné au législateur jusqu’au 1er septembre 2015 pour se mettre en conformité et ont décidé qu’aucune garde à vue de quatre jours ne pourrait être désormais menée pour ce délit.
Mais celles qui ont déjà été menées, comme celles de Bernard Tapie et de son avocat Me Maurice Lantourne dans l’affaire de l’arbitrage litigieux, ne pourront être remises en cause en raison “des conséquences manifestement excessives” que cela entraînerait pour les procédures en cours, a jugé le Conseil.
Une telle remise en cause “méconnaîtrait l’objectif de valeur constitutionnelle de recherche des auteurs d’infractions et aurait des conséquences manifestement excessives”, juge le Conseil.
La garde à vue prolongée à quatre jours est un régime dérogatoire réservé aux affaires de terrorisme ou de grande criminalité. Le législateur a également prévu qu’elle soit applicable à un certain nombre de délits commis en bande organisée, dont celui d’escroquerie.
Bernard Tapie et Maurice Lantourne avaient saisi le Conseil consitutionnel le 16 juillet, estimant disproportionnée la durée de la garde à vue qui leur avait été imposée avant leur mise en examen à l’été 2013.
De fait, comme il l’avait fait en décembre 2013 pour la fraude fiscale ou douanière en bande organisée, “le Conseil a relevé que, même lorsqu’il est commis en bande organisée, le délit d’escroquerie n’est pas susceptible de porter atteinte en lui-même à la sécurité, à la dignité ou à la vie des personnes”.
En conséquence, en permettant une garde à vue aussi longue, “le législateur a permis qu’il soit porté à la liberté individuelle et aux droits de la défense une atteinte qui ne peut être regardée comme proportionnée au but poursuivi”.
Dans l’affaire de l’arbitrage sur la revente controversée d’Adidas par le Crédit lyonnais, trois personnes, outre Bernard Tapie et Maurice Lantourne, sont mises en examen pour escroquerie en bande organisée: le juge-arbitre Pierre Estoup, l’ancien directeur de cabinet de la ministre de l’Economie Christine Lagarde, Stéphane Richard, et l’ancien patron du CDR, la structure chargée de gérer l’héritage du Crédit Lyonnais, Jean-François Rochi.
L’ancienne ministre de l’Economie et actuelle patronne du FMI, Christine Lagarde, a été mise en examen pour négligence par la Cour de justice de la République (CJR).
Les juges soupçonnent que la sentence arbitrale qui avait octroyé quelque 403 millions d’euros à Bernard Tapie ne soit le fruit d’un “simulacre” pour favoriser l’homme d’affaires, avec l’aval de l’exécutif de l’époque.