Le report de l’examen de la loi sur le travail en conseil des ministres n’est “pas un enterrement”, assure le gouvernement, François Hollande jugeant que “rien ne serait pire que l’immobilisme” au moment où la contestation s’organise, avec un premier rendez-vous dans la rue le 9 mars.
Le Premier ministre, Manuel Valls, a décidé lundi de reporter au 24 mars le passage en conseil des ministres du projet, qui se heurte à une forte opposition des syndicats et d’une partie de la gauche, pour le “retravailler”.
Cette décision, analysée comme “une reculade” par de nombreux éditorialistes, “n’est certainement pas un enterrement”, a affirmé Jean-Marie Le Guen, secrétaire d’Etat aux relations avec le Parlement.
“Le texte a donné lieu à des interrogations, c’est assez légitime, à des questionnements, je les comprends. C’est pourquoi le Premier ministre a prévu une concertation. Il vaut mieux prendre du temps pour mieux en gagner”, a expliqué mardi François Hollande en marge d’une visite d’entreprise en Seine-Saint-Denis.
“Il n’y a pas d’autre voie que le mouvement. Rien ne serait pire que l’immobilisme ou de tout mettre en cause dans notre droit, notamment notre droit du travail”, a insisté le président de la République.
Il a, au passage, apporté son soutien à la ministre du Travail, Myriam El Khomri, en première ligne pour défendre le texte et qui a été hospitalisée mardi pour des examens après ce qui a d’abord été présenté comme “un petit malaise”.
Mme El Khomri est “une femme courageuse qui a des convictions” mais est aussi “à l’écoute”, a dit le chef de l’Etat, expliquant qu’elle avait en fait été victime d’un “accident domestique” et “serait sur pied dès ce soir”.
L’opposition au projet a pris plusieurs formes, allant d’une tribune incendiaire signée par des figures de gauche dont Martine Aubry à une pétition rassemblant plus de 840.000 signataires en ligne.
Mardi, plusieurs organisations de jeunesse dont le premier syndicat étudiant, l’Unef, ont appelé à une journée d’action le 9 mars dans toute la France, avec un rassemblement place de la République à Paris, pour réclamer le retrait du projet.
– “Vrais désaccords” –
Dans sa version initiale, le texte prévoit notamment des référendums d’entreprise pour valider des accords minoritaires, un plafonnement des indemnités prud’homales pour les licenciements abusifs, des modifications des modalités de licenciement économique ou encore la création du compte personnel d’activité (CPA) rassemblant les droits sociaux.
“Avec ce projet de loi, le gouvernement franchit une ligne rouge grave”, estime Marthe Corpet, de l’Unef, jugeant scandaleux que “pour lutter contre le chômage, on nous explique que les salariés doivent avoir moins de droits”.
Les lycéens (UNL, Fidl), des organisations politiques de jeunesse (Jeunesses communistes, Parti de gauche, NPA) ou syndicales (CGT) ont pris part à l’appel.
Quant aux syndicats, ils seront une dizaine à participer jeudi à deux intersyndicales pour tenter de se mettre d’accord sur les modifications à réclamer à l’exécutif et discuter d’une mobilisation.
Certains, comme la CGT et FO, exigent le retrait pur et simple du projet. Le secrétaire général de FO, Jean-Claude Mailly, envisage d’ores et déjà “une très grande journée de mobilisation” pour le 31 mars.
D’autres, comme la CFDT, qui a jusqu’ici accompagné la plupart des réformes du quinquennat, pointent de “vrais désaccords”, comme le souligne son secrétaire général, Laurent Berger, mardi dans le Parisien. La CFDT veut faire bouger le texte, notamment sur la définition du licenciement économique ou “les dispositions qui permettent à l’employeur de décider seul” en matière de temps de travail.
Pendant ce temps, Manuel Valls, qui recevra syndicats et patronat à partir de la semaine prochaine, prépare aussi le terrain avec les députés PS avant l’examen du texte à l’Assemblée, toujours prévu début avril.
Mais les députés socialistes “ont le moral dans les chaussettes”, a glissé en privé un président de commission PS, qui comme beaucoup d’autres n’est pas prêt à voter l’avant-projet de loi tel quel.