Présidentielle: la candidature de Macron morcelle un peu plus la gauche, dans l’attente de savoir pour Hollande, et trouble le jeu à droite.
La candidature d’Emmanuel Macron à la présidentielle morcelle un peu plus encore la gauche, toujours dans l’attente de savoir ce que va faire François Hollande, et trouble le jeu à droite à quatre jours du premier tour de la primaire.
- À gauche, Hollande et Valls pris de court -
La gauche semble plus éparpillée que jamais, entre les postulants à la primaire organisée par le PS (Arnaud Montebourg, Benoît Hamon…, les ambitions de Jean-Luc Mélenchon (PG) ou de Yannick Jadot (EELV), et le positionnement encore incertain du Parti communiste.
La candidature de M. Macron s’ajoute à cette myriade, et surtout, elle coupe l’herbe sous le pied de l’exécutif puisque les intentions finales de M. Hollande ou de Manuel Valls ne devraient pas être connues avant deux semaines, au mieux. Le chef de l’État a mis en garde dès mardi contre le risque d’une élimination de la gauche à la présidentielle. “L’enjeu, c’est le rassemblement, c’est la cohésion”, la gauche ne pouvant pas être au “rendez-vous” de 2017 “si elle n’est pas rassemblée”, a-t-il affirmé.
Mais M. Macron semble déterminé à ne se rallier à personne, tout en préemptant une partie de l’électorat de centre-gauche, cible naturelle de MM. Hollande ou Valls. De quoi faire de l’ancien banquier d’affaires une menace quasiment mortelle pour les ambitions de l’exécutif.
Cela s’est traduit par un tir de barrage dans les heures qui ont entouré l’annonce mercredi, des entourages et des intéressés.
Il faut “une expérience qui a été éprouvée par le temps” pour gouverner et “refuser les aventures individuelles”, a immédiatement déclaré le Premier ministre, sans jamais nommer M. Macron.
- À droite, Juppé premier visé -
Vue de droite, l’opération Macron est perçue comme un parasitage de la primaire avant le premier tour dimanche. Premier visé: Alain Juppé et sa campagne tournée vers l’électorat centriste. “Il y a des gens qui sont tentés d’aller voter Juppé, il faut leur offrir une alternative”, expliquait mardi un des soutiens parlementaires de M. Macron.
Depuis plusieurs semaines déjà, le maire de Bordeaux, comme son allié centriste François Bayrou, ne retiennent plus leurs flèches contre M. Macron, jugé “ni compétent, ni loyal”. En avril pourtant, Jean-Pierre Raffarin l’avait cité comme possible Premier ministre.
Mercredi, M. Juppé a tenté de minimiser la menace. “C’est d’abord un problème pour la gauche”, a-t-il dit. M. Macron “peut mordre à la marge sur le centre”, mais “ça n’aura pas de conséquences sur la primaire”, a estimé pour sa part François Fillon, qui, en hausse dans les sondages, a en outre la “conviction” que “les Français ne confieront pas leur destin à quelqu’un qui n’a aucune expérience et surtout qui n’a rien démontré”. Patron par intérim des Républicains et soutien de Nicolas Sarkozy, Laurent Wauquiez a cogné très fort mercredi, dépeignant M. Macron en “symbole des élites mondialisées”.
- Une véritable menace? -
Même s’il se veut en dehors des “jeux d’appareils”, M. Macron devra s’appuyer sur une structure performante pour mener à bon port sa candidature. Mercredi, En Marche! frôlait la barre des 100.000 adhérents, mais ils ne sont pas tenus de verser une cotisation. Le candidat, qui ambitionne de récolter 9 millions d’euros selon son directeur de la communication Sylvain Fort, n’a pour l’instant engrangé que 2,8 millions d’euros et devra se démultiplier sur ce terrain, comme sur la chasse aux 500 parrainages requis.
“Il n’y a pas d’inquiétudes majeures sur les parrainages”, a assuré M. Fort, évoquant le soutien de “40-50 parlementaires” et de “plus de 200 élus locaux”. Cependant, en dépit de quelques ralliements (Gérard Collomb, François Patriat…, En Marche! peine à attirer des figures politiques de poids. Le premier secrétaire du PS Jean-Christophe Cambadélis a réitéré mardi sa menace d’exclure ceux qui choisiront de soutenir M. Macron quand le candidat du PS sera désigné.
Plus généralement, c’est aussi sur l’efficacité du créneau occupé par M. Macron que plane un doute. “Il a tort sur son positionnement ni gauche ni droite”, a estimé Thierry Mandon, secrétaire d’État chargé de l’Enseignement supérieur et de la Recherche. “C’est l’inverse qui se passe aujourd’hui dans le monde. Il y a une radicalisation à droite et à gauche, et entre les deux, il n’y a pas de salut.