L’Union européenne va durcir ses sanctions contre la Russie vendredi pour son rôle dans le conflit en Ukraine en dépit du cessez-le-feu entre Kiev et les rebelles prorusses, provoquant l’ire de Moscou qui prépare une riposte.
Au moment où l’économie russe est au bord de la récession, Moscou — qui a toujours démenti toute implication dans le conflit dans l’est de l’Ukraine — a notamment brandi des restrictions aux importations de certaines voitures ou de produits de l’industrie légère.
En fonction d’une évaluation d’ici fin septembre des progrès sur le terrain en Ukraine, l’UE a néanmoins assuré qu’elle pourrait “suspendre” voire “abroger” ces nouvelles sanctions économiques, qui ont fait plonger la monnaie russe à un nouveau record de faiblesse face au dollar.
Quant à la situation sur le terrain, une source à l’Otan a assuré auprès de l’AFP qu’un millier de soldats russes étaient toujours dans l’est tandis que 20.000 autres restaient massés le long de la frontière. Kiev a confirmé le chiffre de l’Alliance, qui a assuré que “la Russie continue de fournir aux séparatistes des équipements militaires sophistiqués”.
– Les secteurs de la Défense et de l’Energie ciblés –
Après plusieurs jours d’atermoiement, les 28 Etats membres ont décidé d’ajouter vendredi 24 personnalités, “dont les nouveaux dirigeants du Donbass, les membres du gouvernement de Crimée ainsi que des décideurs et oligarques russes” à sa liste de personnes et entités visées par des sanctions ciblées. Cet ajout porte à 119 le nombre total de personnes visées.
Les nouvelles sanctions interdisent aussi tout financement de la dette de trois entreprises russes du secteur de la défense et de trois entreprises russes du secteur de l’énergie, dont les compagnies pétrolières Rosneft et Transneft, ainsi que la branche pétrolière du géant gazier Gazprom.
Alors que le président ukrainien Petro Porochenko a promis mercredi plus d’autonomie aux régions de Donetsk et Lougansk, deux fiefs rebelles qui veulent leur indépendance, Kiev a pour la première fois reconnu jeudi une étendue du contrôle des insurgés de la frontière orientale avec la Russie jusqu’à la mer d’Azov.
Cet état de fait avait été en partie constaté par des équipes de l’AFP le mois dernier après une contre-offensive insurgée en direction des villes stratégiques côtières du sud de la région de Donetsk, au bord de la mer d’Azov.
Si les rebelles s’emparaient du port de Marioupol, dernière grande ville ukrainienne encore sous contrôle de l’armée, cela permettrait de créer un pont terrestre entre la frontière russe et la Crimée, péninsule ukrainienne annexée en mars par la Russie.
Kiev et les rebelles ont signé vendredi un cessez-le-feu destiné à mettre fin à un conflit de près de cinq mois qui a fait plus de 2.700 morts et un demi-million de déplacés et réfugiés.
Les présidents Petro Porochenko et Vladimir Poutine ont estimé cette semaine que l’accord était globalement respecté, mais les Occidentaux restent plutôt méfiants à ce stade.
– L’Otan toujours “préoccupée” –
“L’Otan continue d’appeler la Russie à trouver une solution politique à la crise, de concert avec la communauté internationale et le gouvernement ukrainien”, a indiqué une source militaire, précisant que l’Alliance, accusée par Vladimir Poutine d’être “du parti de la guerre”, était “toujours très préoccupée par la crise Russie/Ukraine”.
Des journalistes de l’AFP à Donetsk ont par ailleurs entendu deux séries de tirs vers 03H00 (minuit GMT) et 05H00 provenant de la zone de l’aéroport, contrôlé par les troupes ukrainiennes et théâtre d’intenses combats ces derniers mois.
Sur un autre front, celui du gaz, la Pologne a ajouté une note d’inquiétude en reprochant jeudi au gazier russe Gazprom d’avoir réduit de près de moitié ses livraisons, une mesure semblant traduire la volonté de Moscou d’empêcher l’approvisionnement de l’Ukraine en “flux inversé” et de lancer un avertissement à l’UE.
Le géant russe a aussitôt qualifié cette annonce d'”incorrecte”, car “les exportations vers la Pologne restaient sans aucun changement, exactement aux mêmes volumes que les jours précédents.
Un bras-de-fer entre Kiev et Moscou sur le paiement d’une dette gazière en juin avait abouti à la coupure des approvisionnements en gaz russe à l’Ukraine, contraignant Kiev à se tourner vers ses partenaires occidentaux.
Dans ce contexte, l’Ukraine accueille à partir de jeudi une conférence de trois jours consacrée à la stratégie pro-européenne de l’Ukraine, qui s’apprête à ratifier d’ici la fin du mois l’accord d’association avec l’Union européenne, une décision qui avait provoqué la colère de Moscou en juin.