Un ancien dirigeant de Bygmalion, Guy Alvès, a été mis en examen mercredi et a confirmé devant le juge d’instruction l’existence d’un système de fausses factures dans la campagne présidentielle de Nicolas Sarkozy en 2012.
Guy Alvès a été mis en examen pour complicité de faux et usage de faux à l’issue de 48 heures de garde à vue, a annoncé son avocat Me Patrick Maisonneuve.
Il “a confirmé devant les enquêteurs et devant le magistrat instructeur qu’il y a eu un dispositif qui a été mis en place aux termes duquel l’UMP prenait en charge de façon irrégulière des frais de campagne de Nicolas Sarkozy”, a déclaré l’avocat, précisant que son client “n’a pas changé la position qui était la sienne”.
Son contrôle judiciaire lui interdit de rencontrer notamment Nicolas Sarkozy et l’ancien patron de l’UMP, Jean-François Copé, dont il était proche, a précisé Me Maisonneuve.
L’autre cofondateur de la société, Bastien Millot, et l’ex-patron de sa filiale événementielle Event and Cie, Franck Attal, eux aussi placés en garde à vue lundi matin, devaient à leur tour être présentés aux juges en vue d’une éventuelle mise en examen.
M. Millot, qui a été confronté à Guy Alvès en garde à vue, a toujours nié avoir eu connaissance d’un système de fausses factures qui aurait permis d’extraire des dépenses des comptes de campagne dans le but de dissimuler un dépassement autorisé du plafond, fixé à 22,5 millions d’euros.
– Nicolas Sarkozy savait-il ? –
Pour cela, Event and Cie, la filiale événementielle de Bygmalion, avait facturé de nombreuses dépenses à l’UMP et non à la campagne Sarkozy, via de fausses conventions du parti. Selon une évaluation figurant au dossier, quelque 18,5 millions d’euros auraient ainsi été éludés, a indiqué une source proche du dossier.
Fin juin, le parquet de Paris avait ouvert une information judiciaire pour “faux et usage de faux”, “abus de confiance” et “tentative d’escroquerie”. L’enquête a été confiée aux juges du pôle financier de Paris, Serge Tournaire, Renaud van Ruymbeke et Roger Le Loire.
L’un des objectifs des enquêteurs est de déterminer jusqu’où était-on informé au sein de l’UMP et de l’équipe de campagne du système de fausses facturations et si les premiers rôles, tels que Jean-François Copé qui dirigeait le parti, et Nicolas Sarkozy lui-même, pouvaient l’ignorer.
Guy Alvès “a été informé par le directeur d’Event, M. Attal, que la demande avait été faite par (Jérôme) Lavrilleux au nom de l’UMP”, a affirmé Me Maisonneuve. Il a réaffirmé que son client avait accepté cette fraude sous la “contrainte économique”.
Bras droit de Jean-François Copé, Jérôme Lavrilleux était directeur adjoint de la campagne de Nicolas Sarkozy. Il a toujours dit que ce dernier et Jean-François Copé n’avaient pas été informés de la mise en place d’un tel système de fausses factures.
Alors qu’elle s’orientait d’abord vers des soupçons de surfacturations au profit de Bygmalion, l’affaire avait explosé fin mai avec les révélations de l’avocat de la société, Patrick Maisonneuve, puis la confession de Jérôme Lavrilleux. Sur le plateau de BFMTV, les larmes aux yeux, il avait reconnu “un dérapage sur le nombre de meetings” et concédé la mise en place d’un système occulte.
Dans un entretien à l’AFP mi-juin, à la veille d’une garde à vue, il avait mis en cause le directeur général de l’UMP, Éric Cesari, le directeur de campagne de Nicolas Sarkozy, Guillaume Lambert, et Fabienne Liadze, directrice financière du parti. Selon Jérôme Lavrilleux, la décision de frauder avait été prise après le second tour de la présidentielle, fin mai-début juin.
Au bout du compte, le Conseil constitutionnel avait quand même estimé que le plafond avait été dépassé, à quelque 23 millions d’euros, privant Nicolas Sarkozy du remboursement public. L’UMP avait alors fait appel aux dons des militants pour payer la facture, via le fameux “Sarkothon”.