Des agriculteurs ont déversé vendredi soir du fumier devant la permanence à Amiens de Barbara Pompili, fraichement nommée secrétaire d’État chargée de la biodiversité dans le nouveau gouvernement.
Le président François Hollande a annoncé jeudi soir 11 février une baisse des cotisations sociales immédiate pour “l’ensemble des agriculteurs”, promettant que les choses allaient “bouger” au niveau européen sur la crise agricole. Pourtant, la colère des agriculteurs ne faiblit pas.
Vendredi soir 12 février, ils ont déversé 15 tonnes de fumier devant la permanence à Amiens, dans la Somme de la toute nouvelle secrétaire d’État chargée de la biodiversité, l’écologiste Barbara Pompili. “C’est un cadeau de bienvenue des agriculteurs pour maintenir la pression sur le gouvernement qui doit sauver nos emplois”, a indiqué à l’AFP Olivier Thibaut, président de l’union des Producteurs de Lait de Picardie. “Notre mouvement s’inscrit dans l’action en cours au niveau national dans la guerre des prix avec les grandes surfaces mais aussi concernant les contraintes environnementales. C’est bien beau la biodiversité, mais on veut qu’elle se batte pour l’emploi : qu’on sauvegarde d’abord les éleveurs avant les ‘petites bêtes'”, a-t-il ajouté.
Plus tôt dans la journée, cinq agriculteurs avaient été placés en garde à vue après des dégradations à la chambre d’agriculture du Finistère à Quimper à l’issue d’une manifestation dans la nuit de jeudi à vendredi. Ils ont été libérés en fin de journée.
– Leclerc visé –
Les agriculteurs de la Somme et du Finistère n’ont pas été les seuls à manifester leur colère. Vendredi, l’agglomération de Niort, dans les Deux-Sèvres, a assisté à un nouveau défilé d’une soixantaine de tracteurs sous l’égide de la FNSEA. Les agriculteurs visaient la grande distribution : “après avoir visé plusieurs enseignes de grossistes sur la zone de Saint-Liguaire, à l’heure de la pause déjeuné, la centaine de manifestants a convergé chez Leclerc en provoquant une belle pagaille aux différents ronds points” rapporte Radio Gâtine.
Toujours dans l’ouest, mais plus haut, les agriculteurs bretons se sont également mobilisés ce samedi 13 février. À 6h du matin, une quarantaine de tracteurs ont déversé du fumier pour bloquer le supermarché de Leclerc de Dinan, dans les Côtes d’Armor. “Avec Leclerc, c’est toujours la course au prix bas, toujours moins cher” dénonce un responsable syndical à Ouest France, avant de préciser : “On ne cible pas le magasin de Dinan mais l’enseigne Leclerc”. Ils sont partis vers 8h, et malgré les restes de fumier devant les portes, la galerie commerciale était accessible au public.
Le Leclerc de Rennes, en Ille-et-Vilaine, était également visé. Les agriculteurs ont déversé dans la nuit des pneus et des gravats devant le centre commercial situé à la limite entre Rennes et Saint-Grégoire, rendant l’accès inaccessible aux automobilistes. Devant de le Géant de Rennes-Saint-Grégoire, une pelleteuse était en action ce samedi matin pour déblayer les entrées, barrées de pneus.
Par ailleurs, selon la Web TV CSTARStv, des agriculteurs étaient également en train de manifester au Leclerc de Ploufragan, dans les Côtes d’Armor.
Le gouvernement fait pression –
Vendredi, les ministres de l’Agriculture et de l’Economie ont accentué la pression sur la grande distribution lors d’une réunion, à laquelle participaient aussi industriels et agriculteurs. “Il n’est pas acceptable que les négociations commerciales conduisent en 2016 à des baisses de prix pour les filières en difficulté”, a déclaré le ministre de l’Économie Emmanuel Macron devant la presse, à la fin de la rencontre, en annonçant un point d’étape d’ici à la mi-mars.
Il a souligné que les contrôles menés par la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF) sur les négociations commerciales (entre fournisseurs et distributeurs) avaient été renforcés de 70% par rapport à l’an dernier, et continueront de l’être jusqu’à la fin février.
Le ministre de l’Agriculture Stéphane Le Foll et Emmanuel Macron ont demandé aux différents acteurs de “faire des propositions concrètes” pour faire évoluer le cadre des négociations commerciales. Cela pourrait notamment passer par la contractualisation “pour mettre plus de transparence et éviter que les marges soient captés par untel ou untel”, a expliqué le ministre de l’Économie.
Le distributeur Auchan a d’ailleurs annoncé vendredi la mise en place d’un contrat tripartite, associant plusieurs producteurs de porc du Nord/Pas-de-Calais, aux discussions avec les industriels pour fixer les prix des produits. Mais, la contractualisation ne fait pas l’unanimité. “C’est quelque part devenir des sous-traitants de la grande distribution et nous ne le voulons pas”, a déclaré le président de l’Ania Jean-Philippe Girard. Un rendez-vous a été fixé à la première quinzaine de mars pour faire un point sur ces propositions.