Le chef de l’Etat a salué les «avancées» du rapport des députés Jean Leonetti et Alain Claeys. S’efforçant d’être le plus consensuel possible, il a promis une loi permettant de «mourir dans la dignité» et demandé un débat au Parlement «dès le mois de janvier». Faire évoluer le droit sur un important sujet de société, comme il l’avait promis pendant la campagne. Mais ne pas allumer d’incendie . C’est la ligne de crête sur laquelle François Hollande s’est efforcé d’avancer, vendredi matin, sur la fin de vie. Le chef de l’Etat a demandé un « débat parlementaire sur la base d’une déclaration du gouvernement dès le mois de janvier » avant la présentation et le vote d’une proposition de loi . « Le temps est venu (…. Mourir dans la dignité pour vivre pleinement sa vie : telle est aujourd’hui la volonté que le législateur mettra dans le droit de notre pays (…. Ce sera une grande avancée », a souligné le président, insistant, très grave tout au long de son allocution, sur le « respect de la volonté des malades » et la souci d’« épargner leur souffrance ». « C’est toute la société que nous faisons progresser », a-t-il martelé, qualifiant le droit à mourir de « sujet le plus délicat, le plus lourd, le plus complexe ».
Le président a, comme prévu, apporté son soutien aux propositions avancées dans le rapport que venaient officiellement de lui remettre les députés Jean Leonetti (UMP) et Alain Claeys (PS). Un texte qui prévoit de nouveaux droits pour les patients en fin de vie, par rapport à la loi Leonetti de 2005, sans aller jusqu’au suicide assisté ou à l’euthanasie. Il propose la possibilité d’une « sédation profonde et continue » évitant certains services en soins palliatifs de réveiller les malades pour s’assurer régulièrement de leur consentement et veut rendre plus contraignant les « directives anticipées » permettant à chacun d’exprimer par avance son opposition à tout acharnement thérapeutique (les souhaits des malades seraient signalés sur les cartes vitales). François Hollande a salué ces « deux avancées » qui « comblent », a-t-il dit, « les principales lacunes de notre droit ». « C’est à partir de ce travail » que la discussion doit s’engager, a-t-il expliqué.
« Faire évoluer les mentalités »
Le chef de l’Etat, qui s’est donné du temps depuis son entrée à l’Elysée (mission Sicard en 2012, avis du Comité national d’éthique en 2013, rapport Leonetti-Claeys en 2014), a également promis un « enseignement spécifique » sur ce sujet pour les professions médicales, dès la rentrée 2015, qui s’intégrera dans un « plan triennal » pour le développement des soins palliatifs. « Il faut faire évoluer les mentalités, les attitudes, les pratiques », a-t-il expliqué. François Hollande espère un consensus sur la « proposition de dépassement » de Jean Leonetti et Alain Claeys, « deux parlementaires qui ne partageaient pas au départ les mêmes idées ». « Certains nous reprocheront de ne pas aller plus loin et d’autres pas assez », a d’emblée reconnu Jean Leonetti.
Le chef de l’Etat sait le terrain sensible, pour ne pas dire miné. Il se souvient que l’ouverture du mariage aux homosexuels a enflammé l’Assemblée et poussé plusieurs centaines de milliers de Français à battre le pavé. A l’inverse, une partie de sa majorité a fait de la fin de vie un cheval de bataille. En octobre dernier, le chef de l’Etat a promis aux Radicaux de gauche, qui en avaient fait une condition pour rester au gouvernement, qu’un texte de loi serait déposé au Parlement.
Le 14 janvier, lors de sa conférence de presse, François Hollande avait souhaité « que ce texte puisse être élaboré sans polémiques, sans divisions et simplement dans l’idée qu’un cheminement est possible pour rassembler toute la société ». La formulation de son 21ème engagement de campagne témoignait déjà de sa prudence sur le sujet : « que toute personne majeure en phase avancée ou terminale d’une maladie incurable, provoquant une souffrance physique ou psychique insupportable, et qui ne peut être apaisé, puisse demander, dans des conditions strictes et précises, à bénéficier d’une assistance médicalisée pour terminer sa vie dans la dignité ». Ce matin, il a d’ailleurs pris soin de ne pas une seule fois prononcer le terme d’euthanasie.