François Hollande et Manuel Valls ont promis “la vérité” et appelé à la “responsabilité”, mardi, après les attaques des écologistes contre les forces de l’ordre et le gouvernement, deux jours après la mort de Rémi Fraisse lors d’une manifestation sur le site du barrage contesté de Sivens (Tarn).
Un “scandale absolu”, une “tache indélébile sur l’action de ce gouvernement”, une première depuis la mort de Malik Oussekine lors d’une manifestation étudiante à Paris en 1986: la députée écologiste Cécile Duflot a laissé éclater sa colère, mardi matin sur France Info, après le décès de Rémi Fraisse, victime d’une explosion sur le site, dont l’origine reste à déterminer.
“Il y a 48 heures, un jeune étudiant de 21 ans dont l’activité bénévole était de faire découvrir la nature a été tué dans des conditions qui sont encore à éclaircir mais qui posent des questions extrêmement lourdes. Et depuis 48 heures, aucun membre de ce gouvernement qui avait pourtant, théoriquement, fait de la jeunesse une priorité, ne s’est exprimé pour présenter ses condoléances, pour dire qu’il regrettait infiniment ce qui s’est passé”, a dénoncé la députée de Paris, qui a quitté le gouvernement en avril.
La famille de la victime compte déposer deux plaintes mardi à Albi, dont l’une pour homicide volontaire commis “par une ou plusieurs personnes dépositaires de l’autorité publique”.
Mardi, dans deux déclarations quasi simultanées et à l’unisson, le président François Hollande et son Premier ministre Manuel Valls ont fait part de leur “compassion”, promis “la vérité” et appelé à la “responsabilité”.
“Quelles que soient les circonstances, quand un jeune disparaît, la première des attitudes, des réactions, c’est celle de la compassion. C’est pourquoi j’ai appelé son père ce matin”, a déclaré le chef de l’Etat en marge d’une visite d’ateliers d’écriture à Paris. “La seconde réaction” est “la vérité, toute la vérité sur ce qui s’est passé durant cette manifestation qui a été violente, j’y veillerai personnellement”, a dit le président.
Le Premier ministre a tenu le même discours tout en déplorant des “propos publics excessifs”, chez certains responsables écologistes, “qui ne contribuent pas à l’apaisement”, et des “mises en cause qui ne sont pas à la hauteur de ce que nous connaissons”.
– “Part de responsabilité” des Verts pour Fillon –
Plus tôt dans la journée, Mme Duflot et la secrétaire nationale d’EELV Emmanuelle Cosse avaient dénoncé une faiblesse de la réaction du gouvernement dans les heures suivant l’annonce de ce décès. “Depuis 1977, il n’y avait pas eu de mort dans des manifs écolos” (mort de Vitali Michalon sur le site de Creys-Malville, NDLR). Et “depuis 1986 et Malik Oussekine, il n’y avait pas eu de mort dans une manifestation”, a souligné Mme Cosse.
Les écologistes ont également attaqué les “modalités d’intervention des forces de l’ordre”. L’eurodéputé José Bové a dénoncé une “erreur lourde” du ministre de l’Intérieur, Bernard Cazeneuve, qu’il accuse d’avoir “mis délibérément des gendarmes pour garder une zone dévastée sans aucun engin (de chantier), uniquement pour créer de la tension”.
“Je vois beaucoup d’accusations alors que des enquêtes judiciaires sont en cours et je trouve cela assez peu responsable et assez peu digne”, a répliqué mardi matin M. Cazeneuve qui a recensé 56 policiers et gendarmes blessés depuis septembre lors de manifestations sur différents sites, et dénoncé une “instrumentalisation politique”.
Ces attaques très sévères des écologistes, qui souhaitent la création d’une commission d’enquête parlementaire, surviennent le jour où l’Assemblée nationale se prononce sur le projet de budget de la Sécurité sociale pour 2015. Le résultat sera de nouveau examiné de près, une semaine après l’adoption à une courte majorité de la partie recette du budget de l’Etat ponctuée de 39 abstentions chez les députés socialistes et 14 chez les écologistes.
A droite, François Fillon (UMP) a évoqué une “part de responsabilité” de ceux qui utilisent “la violence politique”, en particulier “les Verts”. La mort de Rémi Fraisse est “un drame” et “je pense à lui et à sa famille d’abord”. “Je ne dis pas que ce sont les Verts qui soutiennent ces extrémistes mais enfin, ils sont ensemble, d’une certaine manière, ils agissent ensemble”, a déclaré l’ancien Premier ministre.
Pour le PS, le premier secrétaire, Jean-Christophe Cambadélis, s’est dit “profondément attristé” et a dit souhaiter, dans un communiqué laconique, “que l’enquête établisse rapidement les circonstances exactes de ce drame”.