Les relations délicates entre le gouvernement israélien et la Maison Blanche ont subi un accroc de plus avec la révélation, juste avant la visite du vice-président américain Joe Biden en Israël, du fait que Benjamin Netanyahu avait décliné une rencontre avec Barack Obama.
La Maison Blanche a indiqué lundi, veille de l’arrivée de M. Biden en Israël pour une visite censée démontrer la force de l’alliance, que le Premier ministre israélien n’avait pas donné suite à une offre d’entretiens avec le président américain le 18 mars.
C’est pourtant le gouvernement israélien qui avait demandé cette entrevue, a souligné la Maison Blanche en termes aussi diplomatiques que possible.
L’une des difficultés consistait à arranger les emplois du temps. M. Obama doit effectuer les 21 et 22 mars un déplacement historique à Cuba. M. Netanyahu aurait pu profiter de la Conférence du groupe de pression pro-israélien AIPAC à Washington du 20 au 22 mars.
“Nous avons été surpris d’apprendre – d’abord par les médias – que le Premier ministre, plutôt que d’accepter notre invitation, avait choisi d’annuler sa visite”, a déclaré Ned Price, porte-parole du Conseil de sécurité nationale (NSC).
Le cabinet de M. Netanyahu a expliqué que le Premier ministre ne voulait pas paraître interférer dans les primaires alors que la campagne “bat son plein” pour la présidentielle américaine. M. Netanyahu s’adressera à l’AIPAC par lien satellite, a dit son cabinet.
Les quotidiens Haaretz et Yedioth Ahronoth liaient quant à eux l’incident aux discussions en cours sur le renouvellement de l’aide militaire américaine à Israël. M. Obama aurait profité d’entretiens avec M. Netanyahu “pour essayer de le convaincre de signer un accord, pour ne pas rester comme un pingre quand il y va de la sécurité d’Israël. Netanyahu préfère, pour sa part, faire affaire avec le prochain président”, écrivait le Yedioth.
– Pas d’initiative majeure –
Le cadre actuel, défini en 2007, prévoyait 30 milliards de dollars sur 10 ans. M. Netanyahu invoque la menace iranienne pour réclamer bien plus pour les dix prochaines années.
Après le pic de tensions de 2015 sur la question nucléaire iranienne, Israël et les Etats-Unis se sont employés à affirmer la vigueur des liens stratégiques.
La visite de M. Biden doit toucher aux nombreux intérêts communs: situation en Syrie, voisin d’Israël, influence iranienne dans la région, menaces jihadistes etc.
Sur un autre sujet primordial cependant, le conflit israélo-palestinien, M. Biden “ne présentera aucune nouvelle initiative majeure”, dit l’administration. La dernière initiative américaine a capoté en avril 2014.
Le vice-président américain rencontrera mercredi les principaux intéressés, M. Netanyahu dans la matinée à Jérusalem, le président palestinien Mahmoud Abbas dans la soirée à Ramallah.
Les perspectives de règlement du conflit semblent totalement bouchées alors qu’une nouvelle vague de violences israélo-palestiniennes se poursuit depuis cinq mois.
Les positions que pourrait prendre dans ses derniers mois une administration américaine frustrée par cet enlisement sont un sujet de conjecture et de préoccupation en Israël.
Le gouvernement israélien s’inquiète que les Etats-Unis rompent avec leur attitude historique et soutiennent une résolution du Conseil de sécurité de l’ONU réprouvée par Israël, dit l’expert Jonathan Rynhold. Il évoque aussi la possibilité d’une déclaration présidentielle énonçant les paramètres de résolution du conflit.
– Le précédent de 2010 –
Les visites de M. Biden en Israël semblent décidément placées sous une mauvaise étoile. Sa venue en mars 2010 avait coïncidé avec l’annonce par Israël de la construction de 1.600 logements dans un quartier de colonisation à Jérusalem-Est, secteur palestinien de la ville occupé et annexé par l’Etat hébreu.
Washington réprouve la poursuite de la colonisation israélienne comme un obstacle majeur à la paix avec les Palestiniens. M. Biden avait vivement réagi contre le timing et la teneur de l’annonce qui avait donné lieu à un accès de crispation avec les Etats-Unis.
Ahmed Majdalani, membre de la direction palestinienne, a dit à l’AFP n’attendre “rien de cette visite” car M. Biden ne vient que pour parler de Syrie avec les Israéliens et “ne nous rencontre que pour la forme”.
Aux Palestiniens, “il va réclamer le calme et plaider pour l’arrêt de l’escalade afin de préserver la stabilité alors que les élections américaines approchent”, a-t-il dit, “et à Israël, il va réclamer de soutenir la solution à deux Etats”. “Mais, au final, l’administration américaine n’a rien en main pour convaincre les deux parties de s’asseoir à la table des négociations”.