À quatre jours du second tour des régionales, et alors que les sondages sont très serrés, le ton monte entre les deux candidats en Île-de-France. Le socialiste Claude Bartolone a suscité une levée de boucliers en affirmant que son adversaire “défend” “Versailles, Neuilly et la race blanche”. La candidate Les Républicains (LR) juge ces propos “abjects”.
Valérie Pécresse “tient les mêmes propos que le FN, elle utilise une image subliminale pour faire peur. Avec un discours comme celui-là, c’est Versailles, Neuilly et la race blanche qu’elle défend en creux”. Voilà l’accusation portée par Claude Bartolone, président de l’Assemblée nationale et candidat PS pour la région Île-de-France, à l’encontre de sa rivale dans un entretien à L’Obs paru ce jeudi 10 décembre. Plus largement, il reproche à la droite son attitude face au Front national.
“Que reste-t-il de leurs valeurs républicaines lorsque sans cesse, ils font cette insupportable danse du ventre aux électeurs du FN, à grand coup de race blanche ? Que reste-t-il de leurs valeurs républicaines quand ils laissent les clés du camion à La Manif pour tous, ce mouvement obscène de négation de la modernité, menaçant ainsi le droit de s’aimer ?”, a lancé Claude Bartolone mercredi soir, lors d’un meeting à Créteil (Val-de-Marne). La référence à la “race blanche” est une allusion aux déclarations de Nadine Morano qui lui ont valu son exclusion de la liste LR-UDI pour les régionales dans l’Est.
– “Abject”, selon Valérie Pécresse –
Ces accusations suscitent un tollé à droite. “C’est abject. J’ai honte pour la politique”, a dénoncé Valérie Pécresse jeudi matin sur LCI et Radio Classique. “D’ailleurs ses déclarations me traitant de raciste ont provoqué un haut le coeur en chaîne. Je viens de recevoir un coup de fil de Calixte Belaya, la fondatrice du mouvement des Africains de France qui me soutient, j’ai reçu aussi le soutien du sénateur radical de gauche des Yvelines Philippe Esnol, qui appelle à voter pour moi, de la tête de liste Nous Citoyens, qui après le 1er tour va appeler à voter pour moi personnellement à la suite de cette déclaration, et la sénatrice de Paris EELV Leïla Aïchi qui appellera à voter pour moi”, se défend la députée des Yvelines. “Ce qui est important, c’est que les Franciliens sachent vraiment qui est M. Bartolone”. Cet “homme du système socialiste et des vieilles méthodes politiques”, qui “a osé traiter une gaulliste sociale de raciste”, “ne peut pas être président de cette région”, insiste-t-elle.
– Fillon, Lagarde et Le Maire indignés –
De son côté, François Fillon dénonce des propos “indignes” et “inadmissibles venant de la part du président de l’Assemblée nationale dans un communiqué ce jeudi. Il ajoute : “Après les attentats et alors que les fanatiques rêvent de désunir notre société, il est consternant de voir le président de l’Assemblée fustiger notre peuple à travers une forme de discrimination antifrançaise.”
Les propos de Claude Bartolone ont aussi fait réagir Jean-Christophe Lagarde, président de l’UDI et soutien de la candidate. Il “veut nous faire croire que Valérie Pécresse est l’enfant naturelle de Mussolini et d’Eva Braun ? Je lui demande de s’excuser ou de retirer ce qu’il vient de dire”, a-t-il déclaré ce jeudi sur Europe 1. Même le candidat du FN en Île-de-France Wallerand de Saint-Just, interrogé par BFMTV, “trouve ces accusations-là exagérées et puériles de la part de M. Bartolone. Personne ne parle de race dans cette campagne.”
Bruno Le Maire s’indigne également. “Non, monsieur Bartolone, aucun combat électoral ne saurait excuser les propos que vous avez tenus contre Valérie Pécresse. Vous avez cru vous grandir, vous vous êtes abaissé. Vous avez cru faire rire, vous nous désolez. Vous avez cru marquer des points, vous vous êtes tiré une balle dans le pied. Vous êtes un des premiers personnages de l’Etat, vous vous êtes comporté comme le dernier des responsables politiques. Vieilles ficelles, vieille politique, propos d’estrade, insultes : vous avez donné hier le spectacle de ce que tous les citoyens français ne veulent plus voir dans notre vie politique. Il est temps que vous soyez battu et que vous remontiez au perchoir : vous retrouverez peut-être un peu de hauteur”, juge le député de l’Eure.
– Claude Bartolone est “l’ami des riches” –
Claude Bartolone et Valérie Pécresse se sont tous deux montrés très offensifs lors de leurs meetings respectifs mercredi. À Issy-les-Moulineaux (Hauts-de-Seine), l’ancienne ministre a dénoncé le “sectarisme” et le “clientélisme” de son adversaire. Selon elle, le candidat PS “dénigre, fustige, insulte ceux qui ne pensent pas comme lui ; il n’y a qu’un mot pour le décrire, il est sectaire”, a-t-elle lancé, devant environ 800 personnes, accusant Claude Bartolone d’être “l’ami des riches”. Entourée de nombreux élus d’Île-de-France (Édouard Balladur, Gérard Larcher, Christine Boutin, Rachida Dati, ou Isabelle et Patrick Balkany), Valérie Pécresse a déclaré : “Nous pouvons mettre fin à 17 ans de gaspillage et de clientélisme”. Elle a aussi fustigé “le système Bartolone”.
– Valérie Pécresse “un serre-tête dans les cheveux” –
Quant à Claude Bartolone, il s’exprimait à Créteil devant la gauche plurielle était au complet : les têtes de listes Emmanuelle Cosse (EELV) et Pierre Laurent (FDG), la maire de Paris Anne Hidalgo, le premier secrétaire du PS Jean-Christophe Cambadélis, la garde des Sceaux Christiane Taubira, l’ex-patronne des Verts Cécile Duflot, le frondeur Benoît Hamon et le président de région sortant Jean-Paul Huchon. Claude Bartolone a parlé d’un “match” qui devient de plus en plus serré avec sa rivale Valérie Pécresse. La “candidate de Sarkozy”, comme il n’a cessé de l’appeler, représente pour lui une droite qui prépare “une véritable purge” dans “toutes les dépenses qui forment le socle de notre vivre ensemble”. Il affirme que son adversaire voudrait “mettre la région en rang, en uniforme, un serre-tête dans les cheveux”.
Un sondage Odoxa pour Le Parisien et BFMTV publié mercredi donne 42% à Valérie Pécresse et 40% à Claude Bartolone, soit un écart dans les marges d’erreur statistiques des sondages. La liste Front national menée par Wallerand de Saint-Just est également qualifiée pour le second tour, après avoir recueilli 18,4% dimanche dernier.