Manuel Valls présentera jeudi en conseil des ministres le dispositif qui remplacera la prime pour l’emploi et le RSA activité.
En quelques jours, tout s’est débloqué. La réforme impossible des aides aux travailleurs pauvres sur laquelle le gouvernement butait depuis deux ans se concrétise. Une semaine après avoir annoncé la suppression de la prime pour l’emploi (PPE), un crédit d’impôt pour les salariés aux faibles revenus, dans le budget rectificatif, le Premier ministre, Manuel Valls, doit annoncer jeudi en conseil des ministres les contours du nouveau dispositif.
A partir de janvier 2016, une « prime d’activité » va remplacer la PPE et le RSA activité. Les ménages seront éligibles en dessous d’un certain seuil de revenus proche du Smic mais pas encore arrêté. La prestation sera ensuite versée individuellement aux membres du foyer qui travaillent. La réforme se veut complémentaire de la baisse d’impôt sur le revenu, qui entrera en vigueur l’an prochain et qui cible les classes moyennes. « Les ménages les plus modestes, qui ne sont pas imposables, ne vont pas bénéficier de la baisse d’impôt, explique-t-on à Matignon. Il n’était pas question d’exclure ces salariés de l’effort pour l’amélioration du pouvoir d’achat». Nouveauté : les jeunes de moins de 25 ans qui n’étaient pas éligibles au RSA activité pourront prétendre à la « prime d’activité », dans des conditions qui restent encore à définir.
La prestation sera en outre simplifiée. Comme le demandait la Caisse nationale d’allocation familiale, gestionnaire du RSA activité et du futur dispositif, le calcul de la prestation sera figé tous les trois mois, alors qu’il évolue tous les mois aujourd’hui.
La réforme se fera à budget constant, c’est à dire en reprenant l’intégralité des crédits alloués au RSA activité (un peu moins de 2 milliards d’euros) ainsi que l’économie générée par la suppression de la PPE à compter de 2016 (1,9 milliard d’euros),soit au total un peu moins de 4 milliards d’euros par an. « La PPE était gelée depuis plusieurs années, son montant décroît de 200 millions par an, plaide Matignon. Cela ne sera a priori pas le cas pour la nouvelle prestation ». Le souhait initial de l’exécutif était pourtant d’augmenter le budget dédié.
La réforme va donc faire des perdants, comme l’ont montré les différents rapports parlementaires sur le sujet. L’exécutif assume ce choix : « Il y avait parmi les bénéficiaires de la PPE des ménages issus des classes moyennes, ceux-là ne percevront plus la prestation. Cela permettra de dégager des marges de manoeuvre pour une redistribution au voisinage du SMIC ».
Reste que les défauts du RSA activité risquent de demeurer, comme le niveau très élevé du taux de non recours. Un grand nombre de gens y renoncent du fait de la lourdeur des formalités ou parce qu’ils pensent ne pas y avoir droit. Certains ménages pourraient en outre être rebutés par une prime de quelques euros seulement.
La suppression de la PPE sera votée cette année pour s’appliquer en 2016 car c’est un crédit d’impôt. Mais le reste de la réforme fera l’objet d’une concertation avec les parlementaires et les partenaires sociaux. « Il faut décider plus finement de la population éligible, décider des niveaux de revenus » , explique-t-on à Matignon. Le plancher sera-t-il fixé autour de 0,3 Smic ? Le plafond autour de 1,2 ou 1,3 Smic ? Quel sera le montant ? Quel mécanisme de lissage ? Nombre de questions restent en suspens. La nouvelle « prime d’activité » fera l’objet d’un texte de loi ad hoc l’année prochaine.